Au terme de plusieurs mois de vifs débats et de manifestations, et aprés une série de votes négatifs en commission, le Parlement européen a voté contre le traité de lutte contre la contrefaçon ACTA, par 478 voix contre, 39 voix pour et 165 abstentions.
Ce texte, négocié en secret entre une dizaine de pays (Europe, Etats-Unis, Japon…) instaurait un accord commercial visant à lutter contre la contrefaçon, tant physique que numérique.
Il proposait notamment de renforcer la lutte contre les médicaments contrefaits ou d’harmoniser les outils de répression contre le téléchargement illégal.
Mais pour de nombreuses associations de défense des libertés numériques ou de défense des malades du sida, le texte présentait des risques d’importantes dérives.
Sur la forme, d’abord:
Le fait que le texte ait été négocié en secret, loin du regard des élus, posait probléme.
Sur le fond, surtout, bien que la version finale du texte ait été débarrassée, de certaines de ses dispositions les plus controversées, il comportait des mesures inédites et jugées liberticides, comme une procédure simplifiée pour que les ayants droit puissent obtenir des fournisseurs d’accés à Internet l’identité des internautes suspectés de télécharger illégalement.
Divisions au sein du PPE
Les débats sur le texte ont révélé, mardi, qu’ACTA ne faisait pas non plus l’unanimité au sein des principales formations politiques du Parlement.
Au sein du Parti populaire européen (PPE), le traité a révélé l’existence d’une ligne de fracture importante entre les élus jugeant que le texte ne protégeait pas assez les libertés fondamentales et les partisans du texte, qui estimaient que le traité, même imparfait, était nécessaire pour améliorer la protection du droit d’auteur en Europe.
Ces divisions internes recoupaient en partie des divisions par pays:
Ainsi, les élus PPE néerlandais ou italiens avaient fait part, en bloc, de leurs importantes réserves sur le texte.
En raison de ces divergences internes, la position commune du principal groupe de droite a changé à plusieurs reprises dans les heures précédant le vote, pour finalement s’établir sur un vote libre, sans consigne de vote de groupe.
Les partisans du texte au sein du PPE avaient tenté, en dernier recours, d’obtenir un report du vote en séance pléniére, sans succés ; au final, de nombreux élus du PPE ont fait le choix de l’abstention.
Pour les opposants au traité, le vote est une victoire nette.
Citation:
Surtout, « le texte a permis d’ouvrir un grand débat public, y compris à l’intérieur du PPE, sur la nécessité d’une réforme du droit de la propriété intellectuelle en Europe », se félicite Jérémie Zimmermann, porte-parole du collectif la Quadrature du Net, trés impliqué dans la mobilisation conter ACTA.
« Ces débats ont également montré ce que peut faire la mobilisation citoyenne, il y a eu des millions d’e-mails envoyés aux députés, des dizaines de milliers de coups de téléphone, c’est un véritable sursaut démocratique. »
Pour les défenseurs des libertés numériques, le rejet d’ACTA constitue une étape de plus, quelques mois aprés l’ajournement sine die des projets de loi PIPA (Protect Intellectual Property Act) et SOPA (Stop Online Piracy Act) aux Etats-Unis, qui visaient à renforcer la protection du droit d’auteur au détriment, pour leurs détracteurs, des droits fondamentaux des citoyens.
Pour M. Zimmermann, il s’agit bien d’un mouvement global, international.
[quote] »Il n’y a pas un Internet américain, un Internet européen, la carte des Internets n’a pas de bordures, aujourd’hui, on assiste à une mobilisation globale, un réseau dans lequel chacun de nous est un noeud.
C’est cette leçon-là qui doit durer au-delà d’ACTA. »
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